Forum citoyen Après-mine · Plénière 3 · Droit minier français et après-mine : quels cadres législatif et administratif, et quelles responsabilités ?

 

3.1. État des lieux des dispositions législatives et règlementaires relatives aux anciens sites miniers | SystExt

Principales dispositions du code minier et des décrets d’application associés · Mise en évidence des vides juridiques · Évolutions récentes dans le cadre de la "réforme du code minier" · Cas particulier de la directive DDIE · Retour sur la mission d’information du Sénat de 2021.

• Dommages miniers versus pollutions minières

L’ancien exploitant ou l’État sont responsables des dommages miniers, qui se limitent globalement aux risques géotechniques et aux risques liés aux émissions de gaz. Ainsi, les pollutions minières ne sont pas considérées comme dommages, et leur responsabilité revient aux propriétaires concernés. Concernant cette problématique, la directive européenne 2006/21/CE dite "DDIE", transposée dans le droit français en 2010/2011, impose aux états membres de réaliser un inventaire des installations de gestion de déchets fermées menaçant la santé humaine ou l’environnement. L’inventaire mis à disposition par l’État français est cependant lacunaire.

• Démarches institutionnelles et juridiques récentes

Une commission d’enquête sénatoriale sur les pollutions industrielles et minières des sols a émis des recommandations en lien direct avec les problématiques minières dans un rapport publié en septembre 2020. Le gouvernement s'est engagé dans une refonte du code minier depuis août 2021, et disposait de la possibilité de le modifier par voie d'ordonnances jusqu'au 22 novembre 2022. Les évolutions introduites dans ces réformes contiennent certaines dispositions pour les risques associés aux mines susceptibles d’ouvrir à l’avenir, mais ne prévoient aucune mise à jour pour l’après-mine actuelle.

Nota : Depuis le forum, 1 ordonnance et 2 décrets modificatifs sont parus : Ordonnance n° 2022-1423 du 10 novembre 2022 portant diverses dispositions relatives au code minier · Lien ; Décret n° 2022-1485 du 28 novembre 2022 relatif à la prévention des risques miniers, au régime des travaux miniers ou de stockage souterrain ainsi qu'aux garanties financières propres à ces activités · Lien ; Décret n° 2023-13 du 11 janvier 2023 relatif à l'autorisation environnementale des travaux miniers · Lien.

3.2. Limites et perspectives dans la réparation des dommages miniers et les processus d’indemnisation | Josiane MADELAINE, Collectif de défense des bassins miniers lorrains

Cadre légal et administratif associé à la réparation des dommages miniers · Limites des dispositifs de prise en charge et d'indemnisation des victimes · Répartition des responsabilités (ancien exploitant, État, collectivités et propriétaires privés).

• Dommages miniers majeurs en région Lorraine

La région Lorraine comporte trois bassins miniers pour l’exploitation du fer, du charbon et du sel, qui s’étendent sur 480 communes. Ils ont été exploités pendant plus de 150 ans, jusqu’à la fin du 20ème siècle - début du 21ème siècle. Lors de la fermeture des mines de fer et l’arrêt de l’exhaure dans les années 1990, de graves affaissements sont survenus, entraînant des dommages considérables (sur le bâti, notamment). Les quelques mises à jour du code minier effectuées en urgence avec la loi sur l’après-mine de 1994 n’ont pas apporté de solution aux impacts associés. Pour pallier ces lacunes, le Collectif de défense des bassins miniers lorrains s’est constitué en 1996, rassemblant alors une centaine de communes, 300 000 habitants et une vingtaine d’associations. Celui-ci se mobilise sur les problématiques associées à la réparation des dommages miniers et à l’indemnisation des victimes.

• Défaillances de l’État dans la gestion des dommages et l’indemnisation des victimes

Le Collectif dénonce notamment l’indemnisation de certaines victimes via le Fonds de Garanties des Assurances Obligatoires de dommages (FGAO). En effet, il revient ainsi à l’ensemble des assurés d’assumer cette charge, alors que l’ancien exploitant ou l’État sont responsables des dommages. De plus, dans le cas de la réparation des dommages miniers, l’État est juge et parti, étant responsable de la réparation ainsi que de l’évaluation de la valeur des biens à réparer. La mise à jour du code minier en cours, effectuée par ordonnance, court-circuite de plus le débat parlementaire et certaines des dispositions tendent à exonérer de leurs responsabilités les exploitants et l’État.

3.3. Déresponsabilisation de l’État français dans la gestion des risques et dans la prise en charge des victimes | Annie THÉBAUD-MONY, Association Henri Pézerat Travail - Santé - Environnement

Retours d’expérience sur des cas de manquements de l’État dans la prise en charge des victimes · Difficultés dans la mise en œuvre de leviers juridiques (administratif et pénal) · Insuffisances réglementaires et administratives à l’origine d'une déresponsabilisation.

• Droits fondamentaux et responsabilité de l’État

Le rôle de l’État concernant la santé et la sécurité est de garantir les droits fondamentaux des travailleurs et des riverains à ne pas être mis en danger (tel qu’inscrit dans le code pénal). Il a ainsi pour mission de faire appliquer la loi (codes du travail, de la santé publique, de l’environnement), de contrôler et de sanctionner (inspection du travail, DREAL, ARS), de faire appliquer le principe pollueur-payeur, d’assurer une vigilance sanitaire (suivi professionnel et post-professionnel, registres de cancers, suivi sanitaire des populations victimes de désastres environnementaux).

• Inaction "active" de l’État

Les retours d’expérience des mines d’or-arsenic de Salsigne (11) et de tungstène de Salau (09) permettent de mettre en exergue l’inaction "active" de l’État à travers : (1) le défaut de vigilance sanitaire pour surveiller la morbidité et les facteurs de risques ; (2) le maintien du doute épidémiologique concernant l’exposition à des substances cancérogènes, la causalité entre l’exposition à une substance et l’impact sanitaire ne pouvant jamais être démontrée ; (3) la responsabilisation des victimes, notamment accentuée par les modifications législatives et réglementaires récentes ; (4) le déni de responsabilité pénale des anciens exploitants. Ainsi, ces sites miniers induisent l’invisibilisation des victimes par l’absence de production des connaissances sur les conséquences sanitaires des risques miniers et industriels. Selon l’intervenante, ceci constitue alors un "consentement meurtrier" de la part de l’État. En effet, il ne peut plus nier les crimes industriels mais perpétue l’impunité des responsables.

 

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